Echopolitique

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L’Islande ou comment un petit peuple gardant sa souveraineté refuse les diktats bancaires et européens

Posted by echopolitique sur 23 avril, 2011

Les islandais ont refusé par 2 fois le diktat des banques, des autres pays européens et de leurs dirigeants...un véritable exemple pour tous ceux qui pensent qu'une Autre Politique est possible !

Nos cousins du Nord sont en train de nous donner une belle leçon de démocratie et de retour du politique dans l’indifférence totale des médias et le silence de nos élites. Et pour cause, ils font preuve d’une indépendance que nous avons volontairement abdiquée et qu’il serait cruel de nous rappeler.  Et ils nous montrent une voie pour la sortie de crise contraire à tous les dogmes européistes.

Mais revenons au commencement, en 2008, l’économie islandaise qui avait basé son développement fulgurant de la dernière décennie sur un secteur bancaire atrophié (les avoirs des banques représentaient 10 fois le PIB), est au bord de la faillite. La crise financière entraine la chute des grandes banques du pays et le pays décide de les nationaliser. Mais contrairement à celui de l’Irlande, le gouvernement choisit de ne pas les renflouer et les laisse faire faillite tout en garantissant les dépôts des seuls islandais. Le pays subit un choc très rude, la couronne se dévalue fortement (au point d’envisager d’entrer dans l’Union Européenne et l’euro), le PIB accuse un fort recul ce qui conduit le gouvernement à formuler une demande d’aide auprès du FMI et de la Russie afin de boucler les fins de mois difficiles. Après avoir passé la phase la plus aigue de la crise, le gouvernement de centre-droit est obligé de démissionner pour laisser place à une alliance de gauche.

Dans cette tourmente bancaire, bon nombre de britanniques et de néerlandais (et plus particulièrement des fonds de pension gérant leur retraite) ont perdu près de 4 milliards dans la faillite d’Icesave. Devant cela, leurs gouvernements respectifs ont garanti les fonds (en clair les ont remboursés sur le budget de l’Etat) et se sont retournés contre le gouvernement de Reykjavik pour obtenir un remboursement de l’Etat islandais. Les gouvernements  – dont le nouveau gouvernement islandais de gauche fraichement élu sur le refus du peuple de payer pour la crise des banques – se mettent d’accord sur un plan de remboursement 3,8 milliards d’euros, ce qui représente tout de même 40% du PIB islandais…pour rembourser les clients britanniques et néerlandais d’une faillite d’une banque en ligne opérant principalement à l’étranger !

Après un premier texte souple (avec des remboursements indexés sur le PIB) voté, le Parlement vote, sous la pression de la Commission Européenne, un second plan plus dur qui forcera tous les islandais à se serrer la ceinture jusqu’en 2024 avec une ponction d’environ 100 euros par mois pour tous les islandais…Les citoyens ne l’entendent pas de cette oreille et devant la pression populaire (une pétition est signée par 60 000 islandais soit près d’une personne sur 5), le Président décide de ne pas promulguer la loi et organise un referendum en mars 2010 dont le résultat est bien entendu négatif (à 93%).  De nouvelles négociations avec l’Angleterre et les Pays-Bas aboutissent à un accord plus avantageux pour l’Irlande, qu’encore une fois le Président refuse de promulguer et qui est à nouveau rejeté par referendum le 9 avril 2011 à plus de 60%. Le message est clair : les islandais refusent de payer pour les folies bancaires et ses injustices (privatisation des bénéfices, socialisation des pertes).

Durant cette campagne référendaire, les mêmes arguments ont été utilisés qu’ici en 2005 pour défendre l’euro et l’Union Européenne : il en serait fini de la crédibilité de l’Islande, des relations avec les Pays-Bas et l’Angleterre et avec toute l’Europe, l’Islande serait isolée et mise à l’écart, elle ne pourrait pas s’en sortir toute seule…Bref, toujours la même ritournelle des défaitistes qui n’osent pas penser autrement que comme leurs maîtres. Et pourtant, qu’est-ce qui justifierait que les contribuables islandais soient ponctionnés pour renflouer des investisseurs étrangers dont les placements risqués dans une banque se seraient écroulés ?

L’Histoire en a dit autrement : les referendums ont rejeté massivement les plans de remboursement et l’Islande n’a pas été mise au ban des nations, l’Angleterre n’a pas déclaré la guerre à ce membre de l’OTAN et le peuple islandais a gardé sa fierté et son indépendance. Ils ont donc pris collectivement une décision justifiée moralement et économiquement. Les islandais ont même choisi pour sortir de l’impasse où l’avait menée sa classe politique, d’élire une assemblée constituante qui sera chargée d’établir une nouvelle constitution et de statuer sur la question primordiale des transferts des pouvoirs souverains aux organisations internationales.

Côté économie, la situation s’est franchement améliorée : bien sûr, les islandais ont vécu une période difficile avec une forte chute du PIB mais depuis quelques temps et grâce à la dévaluation de la couronne, les exportations repartent et le PIB croit de nouveau. Le secteur financier est revenu à une taille normale et surtout le coût du sauvetage n’a pas plombé le budget de l’Etat ni le système social du pays.

L’Islande a appliqué ce qui doit être fait pour sortir de la crise de la dette : refus du soutien aveugle aux banques,  refus des purges (ce qui ne veut pas dire dépenser à tout va l’argent public ni se dispenser de mettre de l’’ordre dans le modèle social comme il y en aura besoin en France) qui ne font qu’aggraver le mal, refus de la politique déflationniste qui alourdit le poids de la dette, restructuration de la dette , contrôle temporaire des capitaux, acceptation d’une inflation supérieure au 2% allemand et surtout dévaluation afin de relancer l’économie et pouvoir rembourser la dette. Les Islandais, contrairement aux irlandais, ont choisi de laisser tomber les banques plutôt que leur peuple… la démonstration même qu’une alternative à la politique de Messieurs Trichet, Barroso et Strauss-Kahn est possible.

Mais tout ceci n’a été possible que parce que leur Président est d’abord un homme très respectable et respectueux de la volonté populaire et que le peuple a pu être consulté par referendum. Et aussi parce que les islandais étaient en dehors de l’Union Européenne et surtout de l’Euro : l’Islande possédait encore sa propre monnaie, n’avait pas transféré à Bruxelles de pans entiers de sa souveraineté et ne s’était pas lié les mains avec des traités européens de Luxembourg, Maastricht, Amsterdam et Lisbonne. Et de ce fait, ils n’ont pas eu à subir les purges des experts du FMI-BCE-Commission Européenne pour des erreurs commises par les banquiers privés (et les régulateurs).

En clair, cela n’a été possible que parce que l’Islande était toujours un pays souverain. Pas étonnant qu’aujourd’hui plus personne ne parle en Islande d’adhérer à l’Euro ni même à l’Union Européenne. Pas étonnant non plus que les médias ne parlent pas trop fort de ce qui se passe chez ces islandais qui refusent les dogmes de la pensée unique européiste…

Une Réponse to “L’Islande ou comment un petit peuple gardant sa souveraineté refuse les diktats bancaires et européens”

  1. BOESPFLUG said

    Un bel exemple pour la Grèce, l’Irlande, l’Espagne, la France, etc …

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